Khaled Nezzar s’est fait arrêté par la justice suisse sur demande de l’ONG TRIAL. Certains crient ou se réjouissent déjà à la manifestation de la justice au profit des victimes algériennes. Il y a quelques flous qui nous interpellent et qui doivent être levés si l’Algérien ne veut pas être berné une fois de plus. Je vais remonter loin dans mes mémoires du passé et du présent pour tenter de comprendre par déduction logique et évocation mnésique, au-delà du sensationnel de la nouvelle, la signification de cette arrestation et son environnement politicien :
1 – Au début des années 70 il m’arrivait de partir souvent en mission à Oran et le soir rencontrer des amis officiers qui m’invitaient à manger au Mess des officiers. Je garde le souvenir du colonel Chadli chef de la 6 ème Région militaire et du commandant Khaled Nezzar son chef d’État Major. Avec d’autres officiers, ils venaient jouer au domino. Si le lieu n’indiquait pas un Mess des officiers, on aurait pu se croire dans n’importe quel café maure dans un bled perdu en Algérie et y voir des gens joviaux, insouciants, bruyants, frapper les dominos pour tuer le temps et meubler leurs esprits. Nous sommes loin de l’image que présentent les romans et les films des clubs anglo-saxons où les officiers sont face à des livres, à des jeux plus complexes et à d’autres discussions sur un point de la carte du monde ou sur un symbole de la grandeur de l’empire. Sans mépris ni racisme, on ne voyait pas sur ce visage simplet posé sur une grande stature physique ni les traces de l’intelligence, ni ceux de la lecture de livres ni de cartes d’état majors. On ne pouvait jamais imaginer que l’un serait Président de la République et que l’autre serait Chef d’État major général des armées puis Ministre de la Défense et présenté comme l’homme fort de l’Algérie.
Il était impossible sur le plan intuitif de voir cet homme présenté comme un Décideur ou comme un monstre. A ce jour je garde l’image d’un homme insignifiant que les circonstances historiques de l’Algérie, la mort de Boumediene, et les réseaux occultes qui commandent l’Algérie à partir de l’axe Paris Washington ont propulsé au devant de la scène. Les Algériens avertis connaissent son incapacité à organiser l’armée sur le plan professionnel et à s’entourer de cadres compétents. Il est étonnant que dans la lutte qui l’a opposé à Liamine Zéroual sur la doctrine militaire de l’Algérie puisse être en la défaveur de ce dernier par ses qualités humaines, sa compétence professionnelle et le soutien des Djounouds et des Officiers de l’ANP. Sa victoire, il ne la doit qu’à des facteurs exogènes et milite pour la thèse que je continue à défendre : Le pouvoir réel en Algérie n’a jamais appartenu ni au FLN ni à l’armée mais à d’autres sphères qui ont suffisamment de dossiers sur les Algériens et de connaissance sur l’Algérie pour instrumentaliser le FLN et l’ANP et les présenter comme des décideurs en organisant des conclaves « club des pins ». Ces sphères de décision ou d’influence sont étrangères avec leurs réseaux structurés dans l’économie algérienne et la bureaucratie des institutions de façade. Par la corruption, ils procèdent à la cooptation des cadres poussés à s’organiser en réseau mafieux de partages de rentes puis en réseaux matrimoniaux de partage de la légitimité des fortunes colossales accumulées dans l’économie informelle, dans l’import et à l’ombre du secteur public qu’ils ont sucé comme des sangsues.
Au sein de l’armée le même système de cooptation, de primes, de corruption a joué pour acheter le silence, les allégeances aux figurants dans l’armée qui ne sont pas le pouvoir réel mais qui ont la puissance de vider l’armée de ses meilleurs cadres. Quand on étudie les dictatures militaires dans le tiers monde, le turn over et les démobilisations sont rares dans la hiérarchie qui commandent et qui gouvernent. L’Algérie se singularise par un turn over, une mise à la retraite au sommet de la hiérarchie selon aucun critère logique et surtout une pléthore d’officiers généraux et d’officiers supérieurs contraires à la structure pyramidale équilibrée dans toute armée du monde et surtout contraire à la pyramide très en pointe dans les dictatures. Est-ce que les colonels du conseil de la Révolution de Boumediene pouvaient se faire virer comme des concierges ou se faire corrompre et laisser le pouvoir ? Où bien ils ne détenaient pas le pouvoir ou bien ils sont à l’instar de Nezzar des simples d’esprit, forts dans les calculs d’épiciers et d’allégeance. Sans doute les deux. Avec l’une, l’autre ou les deux possibilités, il est impossible de gouverner un pays complexe comme l’Algérie ni de l’emmener à cet état de délabrement mis en marge de la civilisation, de ruines jetées hors de l’histoire des hommes, de traitrise mettant la révolution algérienne en situation de tare, de honte que les journaux algériens affichent et que certains « intellectuels » proclament allant jusqu’à regretter le colonialisme voire solliciter son intervention.
2 – Nezzar, ce grand gaillard restait inconnu du public algérien qui considérait l’ANP comme la colonne vertébrale du pays et sa fierté nationale faute d’avoir des intellectuels qui exaltent la grandeur de ce peuple et le mettent face à ses devoirs. Malek Bennabi était inaccessible. Il est apparu comme chef des armées et décideur de l’Algérie le jour où Ali Belhadj, à la suite de la première guerre du Golf, a cru se substituer à l’état inexistant et aller défier l’ANP en tenue militaire faisant de l’ANP une armée de lâches, de traitres. Ali Belhadj a donné aux décideurs réels de faire monter au créneau médiatique Khaled Nezzar et de le présenter comme le véritable et unique patron de l’armée, le sauveur de l’Algérie contre l’intégrisme. Sans évoquer le vrai du faux des événements de Gammar, des camps d’entrainements militaires islamistes dans la région de Jijel et autres lieux qui impliquaient l’armée dans le champ sécuritaire et répressif, il y a une question à laquelle Ali Belhadj doit répondre : Qui lui a soufflé cette posture alors que trois logiques s’y opposaient. La première qui a intérêt à aller à la confrontation symbolique annonçant la confrontation militaire avec l’armée ? Qui a intérêt aux exacerbations politiques et sociales allant à la fragmentation de la société alors que l’agression impérialiste contre l’Irak était en voie d’exécution et que l’Algérie venait à peine de faire face aux opérations de subversions en Kabylie et surtout à l’agression israélienne en Tunisie qui est notre profondeur stratégique et à laquelle il fallait ouvrir un débat géostratégique, politique et technico militaire pour la défense du territoire et de sa profondeur stratégique, l’Algérie annonçait de grandes réformes politiques, sociales, économiques, culturelles qui demandent à être débattues, enrichies et accompagnées sinon clarifiées au lieu d’entrer dans la confusion des mots et des postures ? Si Ali Belhadj donne le temps de ses inspirateurs, il aura éclairé l’histoire algérienne et dévoilé le complot mené contre l’Algérie que sa rhétorique véhémente ne pouvait ni voir ni comprendre comme celle de l’ensemble des cadres du FIS.
3 – Le Général Liamine Zéroual était l’ennemi déclaré et l’opposé de Khaled Nezzar. Un professionnel, un pur produit de l’ANP, une possibilité de sortie de crise. Il avait confié au Général Djouadi le soin de dialoguer avec le FIS pour sauver l’Algérie qui politiquement, économiquement, socialement, diplomatiquement, sécuritairement, s’effondrait… Il n’a trouvé aucune disposition des dirigeants du FIS au dialogue par absence de culture du dialogue, par esprit de revanche, par esprit partisan et par méconnaissance de ce qui attendait l’Algérie. Tous les autres acteurs se sont détournés de lui le laissant isolé dans la Présidence sans cadres valables, sans chaine de transmission avec le peuple et face aux monstruosités des GIA et de leurs commanditaires qui l’ont poussé à jeter l’éponge et aller boire son whisky et faire sa partie de domino dans sa ville natale. Autant nous sommes friands de la culture du complot, de la culture messianique et des récits sur le Dajjâl, Gog et Magog, autant nous sommes des nullités en termes d’effort collectif, d’efficacité, de choix de priorités, de compromis en faveur du pays et de son peuple. Nous sommes une malédiction pour nous-mêmes. Nous sommes prêts avec la chute de Nezzar à croire que la voie est libre et qu’Allah (swt) nous a accordé un butin de guerre et qu’en criant « Allah Akbar » pour les uns et « vive la démocratie » pour les autres, nous aurons une Algérie souriante. Au moment où les Musulmans devenus crédules et pitoyables sous les omeyyades se sont mis à acclamer la mort d’Al Hajjaj Hassan Al Bassri leur a rappelé ce Hadith « Tels vous êtes tels vous serez gouvernés… Allah a en sa disponibilité mille Al Hajjaj qui vous feront gouter Son châtiment »
4 – Khaled Nezzar a montré son incapacité à gérer le dossier du livre du sous lieutenant Souidania. En attaquant un sous lieutenant déserteur par un procès en France, il a affiché ce que tout le monde disait : L’Algérie est dirigée par Hizb França et que tous nos malheurs viennent des Adjudants de l’armée française qui sont parvenus par Qodrat ‘Afrit au sommet des centres apparents de décision. La défaite lamentable du Général devant les Tribunaux français est un acte de haute trahison car le linge sale entre algériens est noté par le greffier français et versé aux nombreuses autres archives qui ne doivent pas être toutes en notre faveur et qui expliquent le degré de déliquescence des cadres algériens. Ce procès montre donc l’incompétence de celui qu’on présentait comme l’homme fort de l’Algérie. Il montre surtout l’incompétence des équipes de larbins qui sont à son service et qui auraient pu lui épargner la honte en France et l’arrestation aujourd’hui en Suisse. Cette affaire dévoile sans doute que dans ce vacarme, c’est la CIA qui a marqué un coup aux services français en faisant déjuger un de ses pions par ses tribunaux et que la lutte sur la prédation de l’Algérie est au profit des Américains. Les Français en définitive n’ont récolté que la poussière du vent qu’ils ont semé. S’ils étaient moins arrogants et moins nostalgiques de l’Algérie Française, ils auraient appris ce que l’Émir Abdelkader leur disait : « l’Algérie suffira à nos deux peuples si vous voulez la paix ».
Le Général s’est montré lui et Belkheir les ennemis jurés des Réformes politiques et économiques conduites par le gouvernement Hamrouche. Ces réformes bonnes en principe sur le plan de la liberté, de la souveraineté nationale, de la protection de la monnaie, du redressement de l’économie par la modernisation managériale se sont trouvés chahutées par le FLN, le RCD et le FIS. Excellentes dans leur contenu et leurs objectifs elles ont manqué de réalisme. On ne réforme pas une société sans sa participation ni en allant à contre courant des appareils. Elles ont manqué de pédagogie pour faire adhérer le FIS et faire participer le peuple. Elles ont surtout manqué d’un parlement élu démocratiquement. A ce jour j’ai du mal à comprendre comment espérer réformer le pays sans parti politique derrière soi, sans parlement légitime, sans une partie de l’armée. Les technocrates, dont les sincères étaient peu nombreux, ne peuvent faire une réforme et la conduire comme une révolution de palais. Les contradictions de ces réformes ainsi que les subtilités de leurs visées ne peuvent être saisies par Nezzar et Belkheir. L’instinct animal leur fait pressentir la pertes de quelques privilèges. Le temps a montré que parmi ces privilèges il y avait l’appropriation illégitime du foncier de la Révolution agraire, dénationalisé et distribué en dessous de table. Il y avait même un français de nationalité canadienne qui avait un immense verger entre ouled Fayet et Draria. Pour l’impérialisme français et américain ce n’est que broutille. Ce qui les intéresse est le démantèlement du secteur industriel, l’abolition des banques algériennes, l’ouverture au capital étranger et l’équipement de l’armée en matériel français et américain. Derrière cette bataille économique, il y avait une bataille civilisationnelle : Adosser l’Algérie comme comptoir commercial dans la Méditerannée. Le combat contre les réformes ou pour les coopter et les dénaturer était en réalité entre adosser l’Algérie à la rive latine ou à la côte est des Etats-Unis si ce n’est à la 6ème flotte de l’US Navy. A ce stade de la bataille, les simplistes et les technocrates, même issus des grandes écoles, ne peuvent voir ce qu’il a derrière les mots et derrière l’ébullition de la rue. Les Algérianistes compétents ont été très peu sollicités. A un problème stratégique on lui a apporté des solutions politiques d’un coté et des solutions démagogiques par les autres. Khaled Nezzar et Belkheir pouvaient aiguiser les contradictions et attaquer tous les fronts de l’intérieur selon un agenda ou deux agendas exogènes à l’Algérie. Une chose est certaine c’est qu’ils étaient bénéficiaires illégitimes de la privatisation du foncier.
5 – Le problème de Nezzar avec le sous lieutenant s’est transformé en autre problème avec un colonel de la Sécurité militaire, Mohamed Samraoui, qui attaque Nezzar sur la place publique européenne et dans les médias sous prétexte que ce dernier ou son entourage lui aurait ordonné d’assassiner le dirigeant du FIS en exil en Allemagne. Samraoui présente donc Nezzar comme un simplet qui ignore que ce genre d’assassinat peut être monté en France (sous entendant les réseaux algériens et la collaboration avec les services français) mais il ne peut pas être monté en Allemagne pays de droit, plus transparent et plus éthique que la France. En dehors du fait que nous tournons toujours autour de la France comme un âne tourne autour de la meule qui nous broie, posons-nous d’autres questions pour comprendre la suite de l’affaire suisse. La première question est tellement simple que l’esprit est mis en déroute : Comment ou pourquoi Mohamed Samraoui, ingénieur de formation, issu des grandes écoles du renseignement, champion militaire des échecs et colonel donc acquis au système ne peut pas convaincre un général, joueur de domino, que Rabah Kebir ne peut représenter un danger ni pour l’Algérie ni pour les éradicateurs ni pour l’armée ni un soutien pour le FIS car en dehors de sa rhétorique bigote, il n’a ni l’envergure d’un homme politique ni celle d’un opposant. L’Allemagne était une planque qui a servi d’autres intérêts que ceux des Algériens. Les services de renseignement ne peuvent pas ignorer les limites de Rabah Kébir ni le dispositif dans lequel il était pris en charge. Non seulement il a été un boulet pour son propre camp mais tout l’argent qu’il collectait il l’envoyait aux GIA, wa ma adràka mal gia ?
Mohamed Samraoui et ses chefs, même s’ils ne sont pas décideurs, connaissent les techniques d’exfiltration et la mise d’un agent en réseau dormant. Si l’assassinat de Rabah Kébir n’est d’aucune utilité il peut servir comme prétexte à une désertion ou à une exfiltration et à un stand by. Est-ce la repentance d’un converti au droit chemin ou est-ce le chemin logique de l’exfiltré qui infiltre une organisation. En suivant internet, cette conciergerie planétaire, on constate deux faits qui ne sont pas anodins. Mohamed Samraoui grimpent tous les échelons du mouvement algériens des officiers libres (MAOL) pour en devenir le chef. Dans la foulée ils fondent avec Mourad Dhina l’ancien chef du FIS à l’étranger le mouvement Rachad. Ce mouvement se distingue par une dénonciation du régime et une présence sur Al Jazeera et quelques grandes imbécilités qui ne peuvent échapper aux services algériens ou étrangers. Il n’y a pas de proposition d’alternative ni d’ingénierie pour le changement pacifique. Le peuple algérien et les miliaires algériens, y compris les officiers algériens, dénoncent le système algérien qui leur parait absurde et qui leur échappe. Le groupe Rachad a donné la parole à l’ancien ministre du Plan et ancien premier Ministre Algérien Abdelhamid la Science que le FIS a essayé de récupérer car il est parti en dissidence après avoir éclaté le scandale des 25 milliards de détournement sur la dette algérienne. Il est illogique, aussi bien pour un expert du renseignement que pour un parti politique qui veut se libérer du despotisme de Abassi Madani, de donner crédit à un homme dont la probité morale n’est certes pas mise en cause mais dont la gouvernance a été catastrophique. Cette « sommité de l’économie », alors qu’il était premier ministre, a travaillé sous les ordres du Général Gnayzia alors directeur central de la logistique et du même niveau intellectuel que Nezzar pour arrêter l’investissement productif en Algérie et le remplacer par des IVPE (Investissements de Valorisation du Patrimoine Existant), un gouffre financier qui n’apporte aucune solution managériale et industrielle à l’économie algérienne mise en panne. Ces mêmes illuminés dans le cadre d’une commission nationale ont démantelé le secteur public productif en le restructurant par des découpages administratifs alors que les lois de l’économie et du management parlent de regroupement des métiers principaux et de filialisation ou d’externalisation des métiers auxiliaires pour que l’entreprise se consacre à son véritable savoir faire. L’autre tâche était de subordonner la production à un plan mercatique et non l’inverse. Non seulement ceci n’a pas été fait mais aucun effort ni réflexion n’a été fait pour créer des bureaux d’études d’ingénierie pour mettre fin à la culture du gaspillage celle du « clé en main ». 30 ans après l’Algérie n’est pas capable de produire ses logements, ses trottoirs et le pire elle est obligée pour la rénovation de son parc électrotechnique, immobilier, pétrolier de faire des appels d’offres qui confie l’étude des besoins et l’évaluation des coûts aux constructeurs qui s’organisent en cartels contre les intérêts de l’Algérie.
L’autre membre fondateur de Rachad est un homme intelligent, belle plume mais comme tous les Algériens dans l’opposition il a du mal à gérer le clivage idéologique et à situer sa ligne de démarcation. Pour moi, hors tout appareil, celui du pouvoir ou de l’opposition, il s’agit de trouver un dénominateur commun entre les Algériens qui va cliver deux clans, un clan du changement et un clan du statut quo. Le système et l’expérience algérienne vont montrer que dans chaque clan on va trouver des laïcs de gauche, des libéraux, des nationalistes et des islamistes. La difficulté est de mettre en place le processus qui crée le clivage pour permettre à la majorité qui veut vivre ensemble en paix et dans le progrès de s’exprimer. La politique étant détruite et les partis étant noyautés par les services et désertés par le peuple, il faut lancer le débat d’idées et sur les idées, se mettre à fédérer. Les trois grandes idées pour la décade à venir sont : La liberté, la justice, le refus de l’intervention étrangère et l’économie fondée sur la justice sociale. Une fois l’Algérie réconciliée, sa constitution restaurée et les jeunes impliqués dans la politique et la prise en charge de leur destin, le clivage peut devenir plus tranchant car la société aura récupéré sa liberté de penser, de dire et d’entreprendre. Il ne peut s’agir de faire de la confusion en alignant tous les antagonismes politiques et idéologiques sur le rejet et la dénonciation du système sans alternative ni ingénierie de l’Alternative. Je lis ce qui s’écrit sur le site Hoggar de Abbas Aroua membre fondateur de Rachad, je vois l’inventaire de tous ce qui s’écrit contre le régime algérien. Il faut descendre dans une des casbahs d’Algérie et entrer dans une gargote pour entendre un jeune de 16 ans devant la grille de brochettes vous dire à l’occasion du discours de Bouteflika le 8 mars « qu’est ce qu’il va nous dire de nouveau. Il va parler pendant des heures de la participation de la femme à la révolution algérienne ». Ce jeune illettré est politiquement mur. Il attend autre choses de l’opposition. Aligner des thèses disparates jusqu’à lire des textes réfutant la charia islamique, traiter l’Islam de rétrograde, faire l’apologie du FFS et rendre le culte à Aït Ahmed ce n’est pas ce qu’on attend. Hoggar est devenu un cercle de privilégiés de la plume qui se parlent en autistes et en antagonistes. Il y a quelque chose qui m’échappe ou au contraire c’est tellement évident que je préfère ne pas en dire plus car comme disent les Algériens je vais devenir un Manchar qui déchire en descendant et qui déchire en remontant.
Un colonel des services de sécurité miliaire dans un pays où la sécurité militaire était présente dans toutes les négociations et toutes les signatures de contrats et dans toutes les enquêtes économiques ne peut ignorer ces choses, et s’il les ignore il ne peut apporter aucune expertise politique à un parti qui veut un changement pacifique mais qui n’a aucune connaissance des hommes et des processus qui ont ici construit et ailleurs brisé le rêve des algériens. Ce colonel a donc son statut de déserteur de l’armée algérienne, de fondateur d’un parti politique, d’ingénieur, de promu du KGB, de rebelle à la puissance des généraux qui ont investi en lui, de stratège en jeux d’échec qui sait faire le sacrifice de la reine ou des fous pour sauver son roi ou mettre celui de son adversaire en échec et mat. Avec ce profil, le mouvement Rachad aurait du disposer d’un allié de poids. Non seulement nous n’avons pas vu ce profil se manifester à travers le site de Rachad qui étale au grand jour ses limites. Est-ce que le diplomate fondateur de Rachad a le droit de s’allier avec le CNT Libyen ? Il ne s’agit pas d’un jeu pour narguer la diplomatie algérienne et l’armée algérienne défaillantes dans cette tragédie humaine et dans cette entorse au droit international. D’inspiration islamo-nationaliste, Rachad ne peut faire la faute partisane de Qaradhawi poussé par les FM ou celle de Sallabi poussé par son frère conseiller du roitelet qatari qui se gonfle comme la grenouille de la fable. Il sait que la cause de nos malheurs est l’occident impérialiste et que la logique de libération ne peut s’aligner sur la logique de domination comme il sait que l’Islam interdit de combattre sous l’étendard de la Jahiliya ou de donner le Walla aux mécréants sur les Musulmans. Il est incompréhensible de voir des alliances contre nature comme celle de soutenir les marches du samedi alors que tout indique que ce sont des marches organisées par Said Saâdi pour briser toute contestation populaire comme il l’a fait en poussant l’armée à interrompre le processus électoral. J’ai du mal à comprendre la victime supportant son bourreau. J’ai du mal à comprendre comment une poignée de cadres se disant de haut niveau politique, diplomatique, expliquent sur son site comment faire face aux grenades lacrymogènes comme s’il était un groupe des brigades rouges alors que sa vocation idéologique de préparation, d’organisation et d’exécution du changement est indépendante.
Nous semblons tous porter la même tare, le même simplisme, la même facilité de dénoncer sans offrir d’alternative, la même capacité à créer des appareils pléthoriques comme des coquilles vides. Mohamed Samraoui en homme avisé et expert des structures et des manœuvres n’a rien apporté à Rachad. Il a fait quelque chose de sublime : Sans papier, recherché et connaissant les enjeux politiques et sécuritaires de l’Algérie il se permet d’Aller en Espagne pour participer à un tournoi d’échecs. Bien entendu, il se fait arrêter avec une publicité médiatique qu’il allait être remis aux autorités algériennes. Il ne fut pas remis aux autorités algériennes mais aux autorités allemandes, celles qui ont géré Rabah Kebir. Nezzar dit : si vous me décrivez ces gens comme un monstre c’est que je suis un monstre. C’est la réponse d’un benêt qui confirme que ceux qu’il a formé et qui l’ont servi sont des simplets. Leur diabolisme et leur art de placer les pions, d’avancer et de reculer dans l’opacité qu’ils savent rendre étrangement transparente montrent qu’il y avait un scénario de reconfiguration de l’Algérie où les anciens sont déjà inscrits dans le compte des morts comme Belkheir ou des futurs morts politiquement et économiquement comme Nezzar ou d’autres. Les jeunes loups, les seconds couteaux qui ont exécutés les ordres des simplets sont prêts à la relève pour servir dans l’opacité totale et dans le mépris des algériens considérés comme des abrutis. Rien ne dit que l’affaire espagnole qui a été un prextexte pour Samraoui de se dégager de Rachad ne rentre dans ce scénario d’exfiltration qui annonçait un processus de changement en Algérie qui a été retardé ou mal exécuté.
6 – L’arrestation de Nezzar en Suisse semble s’inscrire dans l’épilogue de la succession de Bouteflika. Il n’y a pas d’Etat avec son droit, ses institutions et ses Commis mais des confréries de mafieux, de marabouts et d’alliances parentales qui luttent pour placer leur parrain américain, saoudien ou français. Quand le journal Al Watan fait des comptes rendues sur l’audition d’un général algérien, c’est honteux pour notre pudeur mais quand ce même journal était le vassal de Nezzar et qu’il change de fusil d’épaule en montrant les imbécilités de Nezzar accusant Aït Ahmed d’agent du FIS et présentant la contradiction à son propre parrain en présentant Ait Ahmed comme le Messie de l’Algérie. Quand je lis des écrits de gens d’un gabarit plus élevé sur le plan intellectuel donnant la Béatitude ou le sacrement à Aït Ahmed, je me dis que chacun est en train de se positionner en futur acteur non en Algérien mais en revanchard. Al Watan n’aurait jamais pris ces largesses humiliantes envers son parrain s’il n’a pas reçu l’ordre de son parrain réel. Khaled Nezzar est un Pinocchio jeté en pâtures comme un bouc-émissaire.
7 – Le presse algérienne, vicieuse et sans morale, nous montre Nezzar sous les traits d’un homme terrorisé. Ce n’est plus l’homme arrogant et colérique du tribunal parisien où il se sentait chez lui, ici il est en territoire inconnu. L’inconnu fait peur. Cette peur réelle ou exagérée par la presse témoigne de deux choses. La première c’est toujours un ignorant. Il ne risque pas d’être extradé en Algérie. Il ne risque pas d’être condamné à mort ni d’être torturé. A son âge et ancien militaire, il peut supporter stoïquement les difficultés d’un cachot, qui comparé à ceux de l’Algérie, est un palace 5 étoiles. La peur ne vient ni de l’inconnu ni du cachot ni de la conscience absente, elle vient de l’être primitif qui comme un animal sent que les couteaux sont aiguisés par les siens qui ont fait beaucoup de vide dans le sérail pour faire entrer l’Algérie dans un ordre, une logique et une discipline conforme au schéma que se fait l’empire américain de son vassal. Ce schéma est servir l’OTAN et les intérêts économiques américains en ordre serré. L’Amérique ne réfléchit pas en pays mais en zone et elle a jeté son dévolu sur l’Algérie pour conduire l’Afrique du Nord. Jusqu’à ce jour elle rencontre l’indocilité, l’inculture et l’esprit de douar des Bachaghas algériens. La miséricorde de Dieu est dans notre malheur. Si nos élites étaient plus intelligentes, il y a longtemps que la prière du vendredi aurait été dite en langue anglaise. Même dans notre douleur nous devons garder la lucidité et l’espoir. Pour le moment la phrase célèbre du grand éradicateur Réda Malek « la peur doit changer de camp » a une valeur de courant alternatif en Algérie.
8 – Pourquoi Khaled Nezzar fait des déclarations sur Ait Ahmed telles qu’il est un agent du FIS ? Est-ce que dans son ahurissement de se voir lâché par les siens, il se rabat sur la personnalité la plus en vue en Suisse ou est-ce qu’il fait comme Ponte Pilate devant le crucifié « ecce homo » c’est l’homme laissant les historiens à ce jour incapable s’il désignait le traitre qui l’a mis sur une fausse piste ou l’homme qui lui a résisté et qu’il voit en sosie et à qui il rend hommage…
9 – L’autre question est celle de voir les étrangers au premier plan dans la défense de nos intérêts ou dans la promotion de nos trahisons comme si nous sommes incapables de nous défendre et incapables d’assumer notre lâcheté. On cite l’ONG Trial qui est derrière son arrestation. Une recherche sur Internet nous met face à son identité : Loge maçonnique. Une recherche plus poussée nous met face à une autre réalité: Loge maçonnique sous contrôle de la CIA. Je ne suis ni expert en occultisme ni un apprenti sorcier d’Yves Bonnet ou d’Alain Chouet qui connaissent les réseaux occultes algériens ainsi que les microcosmes de la politique et de l’aristocratie algérienne pour confirmer ou infirmer la nature de Trial mais les journalistes algériens proches des milieux algériens, français et américains peuvent nous donner la réponse sur l’enjeu de l’arrestation de Nezzar : La fin du Hizb frança au profit du Hizb américa à moins qu’il y ait un sursaut de dignité, peu probable, de tirer leçon du cas libyen et organiser un front de changement sur le clivage idéologique : Résistance contre servitude. Pour l’instant, les faits rapportés par la presse algérienne sont gravissimes : Le Général en retraite Khaled Nezzar accuse le FFS et le département d’Etat américain. Cela ne prouve rien sauf comme on dit en algérien « iyzid at tayn bella ». Est-ce qu’il fait appel à la France son allié, prouvant que l’Algérie est une lutte entre la Cia et les services français dont il est l’homme de main ? Est-ce qu’il y a un lien, selon lui ou selon la presse algérienne, entre le FFS et le département d’état américain tout particulièrement quand on annonce depuis plusieurs jours le retour de Da Hocine comme on avait annoncé le retour de feu Boudiaf.
10 – Il n’est pas anodin que la presse au main de Nezzar et consort fasse bien avant son arrestation grand bruit sur la tyrannie de Boumédiene alors que tous les témoins l’accablant dans cette presse anti-nationale et anti-révolution l’ont servi avec zèle. Il est encore aussi surprenant qu’on fasse dire à Tahar Z’biri que son coup d’état manqué contre Boumédiene avait pour objectif l’instauration de la démocratie et non le refus de voir les Déserteurs de l’armée française prendre les commandes de l’armée au détriment de l’ALN. Nous assistons à un travail de brouiller les cartes et de donner légitimité historique aux éradicateurs tout en réhabilitant dans la mémoire du peuple, ceux avec qui la France a négocié, refusant de négocier avec les Moujahiddines et ceux à qui elle a remis les clés des casernes, des administrations alors que les Moujahiddines descendaient des maquis épuisés par manque de logistique. A chaque événement important en Algérie on assiste à des règlements de comptes, à des retournements historiques et à une presse qui n’a aucune expertise en matière d’investigation et qui se met à livrer des aveux, des révélations.
En conclusion : La culture orale, par le dialecte qui manie des choses et manipule des hommes et non des idées, à laquelle s’ajoute la culture de l’opacité ainsi que celle de l’allusion et de la métaphore, nous rendent tous difficilement compréhensibles et mauvais informateurs que nous soyons général tombé dans un filet, journaliste écrivant sur le filet, imam commentant sourate al Kahf ou simple commun. Mais la mémoire collective de l’occupé durant 132 ans nous a rendu sensible comme des radars de pointe détectant les changements en cours. L’Algérien parvenait à donner avec exactitude le nom du président, du premier ministre et la composition du gouvernement en jouant au domino ou à la rounda tournant le dos à la société civile et politique.
{Allah ne change point ce qui est dans ce peuple tant ce peuple ne change point ce qui est en lui}
Tant que ce peuple n’a pas changé et produit une élite, la succession de Bouteflika comme celle de Chadli et comme celle de Boumediene restera l’affaire des initiés, les experts en tmarbites, tkharbites et tayhoudites. J’étais contraint de citer des noms pour faire oeuvre pédagogique sur les maladies de l’Algérie et montrer mon intime conviction que l’Algérie n’est pas dirigée par des Algériens. Celà n’est pas nouveau. Nous sommes en train de rééditer le congrés de la Soumam qui donne priorité de l’extérieur sur les Moujahiddine de l’ALN sachant que cet extérieur était déja gangréné par le luxe, le sexe, les rapports ambigus avec la France et le Maroc.
TRIAL a déposé plainte pénale contre George W. Bush. Ce serait un peu étonnant tout de même qu’il soit piloté par la CIA.
un petit rectificatif, Chadli pendant les années 70 fut chef de la 2°Région Militaire (Oranie) et non de la 6°. C’est Belkhir jusqu’en 75, puis Guennaïzia qui furent chef d’état major de Chadli à la 2°RM, Nezzar l’était pour la 3°(Béchar) sous le commandement du colonel Salim Saadi.Donc il ne peut y avoir de parti de bellote entre Nezzar et Chadli à Oran, mais certainement avec Belkhir si celà se passe au début des années 70. A part celà votre analyse sur les objectifs politiques ciblés est brillante.
eliamine
Oui vous avez raison c’était la 2e RM; J’ai vu la partie de domino et elle a marqué mon esprit. Il était peut-être de passage. Quand ces souvenirs remontent je comprends le niveau d’indigence et de médiocrité qui ont mené à la destruction de l’Algérie mais en même temps je me dis la monstruosité avec laquelle le peuple algérien a été martyrisé ne peut venir que de simplet sans cervelle ni sens des responsabilités ni coeur d’humanité ou de cervelet réagissant comme des moelles épinières à des ordres venant de Nana Qamir. La vassalité bestiale doit être leur nature misérable.
En parlant de Allemagne, d’accord c’est un pays de droit, mais il n’est pas immunisé contre les pratiques de services étrangers. Il n’y a qu’à voir le nombre de fois où le mossad y a opéré ou dont il a utilisé les passeports pour ces coups; sans oublier la période de la guerre froide dont ce pays était le front et le théâtre principal.
Pour notre pays, notre malheur est notre DJAHILIYA multidimensionnelle et notre infantilisme qui nous fait défiler de colère pour un match de football et jamais pour défendre un coin de verdure, une entreprise publique ou un patrimoine historique.
Nous avons les dirigeants que nous méritons.
SAlam