Pour la première fois en Algérie, un débat public est engagé sur le rôle des services de renseignement. On sait que ces services sont, jusqu’ici, amenés à jouer le rôle d’animateurs d’un système, désormais stérile, qui empêche le déploiement d’une vie politique saine au service d’une ambition nationale authentique. Et qui structure le partage des pouvoirs entre les clans concurrents.
Les Algériens semblaient suivre ce débat, certes avec prudence, mais surtout avec un intérêt grandissant.
Chassez le naturel, il revient au galop. Devant la montée en puissance du débat public, les « stratèges » engagent des opérations médiatiques « effrayantes » pour vider de son contenu politique ce débat prometteur. Il s’agit de le ramener à une affaire de soudards et de gladiateurs, pour pousser les gens à passer à autre chose. Kharroubi Habib semble ainsi fortement impressionné par ces opérations, lorsqu’il écrit ce matin : « Le pays a été transformé en pire qu’une république bananière : un État maffieux sur lequel règnent des «rboubas» autrement plus pernicieux et abominables que les parrains de la Cosa Nostra. Ces «rboubas» se sont déclarés la guerre et se la livrent en recourant aux plus abjectes des méthodes. Chacun a ses «tueurs» stipendiés qu’il a lancés contre l’autre clan ».
La finalité des « dépassements » ultra-médiatiques est de mettre fin aux débats sérieuxqui émergent sur la nécessité de changer de logiciel pour l’Algérie. Poussant ainsi les Algériens à se replier dans l’habituel laissez-les se bouffer entre eux.
Le chef de l’État serait tenté de « siffler la fin de la partie » estime un commentateur, après la déclaration d’hier de Abdelaziz Bouteflika qui, évoquant les « dépassements » actuels déclare : « L’acharnement a pris une ampleur que notre pays n’a jamais connu depuis l’indépendance ».
Si « la fin de partie » est sifflé dans le sérail, à la suite d’un « consensus interne pour assurer le succès des prochaines élections », cela ne concerne en aucune manière les Algériens qui travaillent à changer de cadre politique. Ils continueront à mettre à nu les mécanismes pervers par lesquels un système de pouvoir, encore en vigueur, impose aux services de l’État la tâche de contrecarrer l’émergence des instruments politiques nécessaires à la mise en oeuvre d’un véritable accomplissement national.