Algérie. Jean-Michel APHATIE

Relation France / Algérie. Dans le paysage médiatique français, peu de voix osent s’opposer à la vague dominante d’une droite de plus en plus radicalisée. Jean-Michel Aphatie fait partie de ces rares figures qui tentent d’aller à contre-courant. Récemment, il a rappelé que la France commémore chaque année le massacre d’Oradour-sur-Glane, tout en ignorant les innombrables exactions commises en Algérie. « Vous connaissez l’histoire de la conquête en Algérie ? Combien de villages ont été anéantis, combien de femmes massacrées ? » a-t-il interrogé, provoquant une levée de boucliers au sein des cercles conservateurs et nationalistes.

Cette intervention met en lumière le nœud du contentieux franco-algérien, fruit de 132 ans d’une colonisation brutale, marquée par des massacres systématiques, une guerre de libération sans merci et, aujourd’hui encore, par des pratiques néo-coloniales persistantes. La reconnaissance pleine et entière de ce passé semble toujours taboue, et les excuses officielles restent hors de portée.

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Ces dernières semaines, les milieux de droite et d’extrême droite se sont enflammés sous prétexte de soutenir Boualem Sansal, de commenter les prises de position de certains influenceurs algériens ou encore de prôner des expulsions massives de sans-papiers algériens. Chaque jour, un flot d’attaques contre l’Algérie alimente une crise diplomatique grandissante. Parmi les mesures récentes, le ministre des Affaires étrangères, Jean-Noël Barrot, a annoncé des restrictions de circulation pour certains responsables algériens et menacé d’aller encore plus loin.

Bruno Retailleau et le ministère de l’Intérieur ont, quant à eux, attisé les tensions en insistant sur un « rapport de force » avec Alger, préconisant des sanctions et des mesures coercitives. Cette stratégie rappelle la doctrine de la « politique de la canonnière », méthode coloniale consistant à bombarder depuis la mer les populations jugées hostiles. Si les obus ont laissé place à des pressions économiques et diplomatiques, la logique demeure : contrôler et punir.

Aujourd’hui, ce néo-colonialisme s’exprime à travers des instruments variés : manipulation monétaire (franc CFA), ingérence politique, sanctions économiques, restrictions de visas, expulsion de migrants, et campagnes de diabolisation orchestrées par des médias souvent alignés sur des intérêts étatiques ou industriels.

Le paysage audiovisuel français, dominé par des magnats comme Vincent Bolloré, Patrick Drahi, Rodolphe Saadé, Bernard Arnault et François Pinault, se fait le relais de cette ligne dure. Des chaînes comme BFM, LCI ou RMC participent activement à cette rhétorique en multipliant les attaques contre l’Algérie tout en affichant un soutien inconditionnel à Tel-Aviv.

Toutefois, certaines voix résistent à cette dérive. Des figures comme Dominique de Villepin et des mouvements progressistes tels que La France Insoumise tentent de rétablir une perspective plus nuancée. Mais la France, toujours hantée par ses rêves coloniaux, peine à se détacher de son passé impérial. Alors qu’elle est évincée de nombreuses anciennes colonies, notamment en Afrique, elle persiste à s’imposer face à des états plus petits tout en s’alignant docilement sur les grandes puissances.

Son humiliation dans le dossier ukrainien illustre cette perte d’influence : après avoir rêvé de voir la Russie défaite militairement, Paris a été contraint de suivre la ligne dictée par Donald Trump, y compris sur des dossiers stratégiques comme l’OTAN et l’avenir européen. Son silence sur les prises de position radicales du nouveau président américain concernant Gaza témoigne de cette soumission progressive.

Au final, la France semble condamnée à errer entre nostalgie coloniale et déclin international, incapable de trancher entre une politique de confrontation et une nécessaire réconciliation avec son passé.

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